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vendredi 26 avril 2024
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Fleuve Congo : un voyage de 4700 km dans l’espace et dans le temps

Il naît, sous le nom de Lualaba, dans le sud-est de la RDC. Après Kisangani, il est rebaptisé Congo (et Zaïre sous la présidence de Mobutu). C’est au terme d’un parcours d’environ 4700 kilomètres que le fleuve Congo, après avoir traversé la province du Kongo-Central, se jette dans l’océan Atlantique, à l’ouest du pays. Son bassin versant, de quelque 3,8 millions de km2, relie neuf pays : la RDC, la Zambie, la Tanzanie, le Burundi, le Rwanda, la RCA, le Congo, le Cameroun et l’Angola.

2ème fleuve au monde par son débit

Situé au cœur de l’Afrique, cet immense fleuve est le 8ème au monde par sa longueur et le deuxième, derrière l’Amazone (Brésil), par son débit. Il n’est pas navigable par endroits. Un réseau routier et ferroviaire, en majorité construit à l’époque coloniale, permettait de pallier la communication entre les sections non navigables du fleuve. Aujourd’hui, une grande partie de ce réseau, surtout la voie ferrée, est en mauvais état, faute d’entretien. Dans l’ex-grand Katanga, un effort a été porté sur les routes, pour l’évacuation des produits miniers. Ailleurs, notamment dans la partie nord de la RDC, la situation est plus critique.

« Le fleuve Congo n’est pas un lieu ; c’est un mythe générateur de mythes, un espace fabuleux qui ne cesse de s’ouvrir. [..] ». Serge Mboukou

Porteur de mythes et d’identités

Voie royale, colonne vertébrale de la RDC, le fleuve Congo ne se limite pas à sa dimension économique et de communication. Porteur de mythes et d’identités multiples, il est un voyage à l’intérieur du pays et de sa sous-région, mais aussi un voyage dans l’histoire et dans l’imaginaire de ses populations riveraines. « Le fleuve Congo n’est pas un lieu ; c’est un mythe générateur de mythes, un espace fabuleux qui ne cesse de s’ouvrir. [..] En même temps que les eaux folles et gonflées de terres ocres, arrachées sur les rivages, qui les colorent d’un rouge épais et sanguin, le fleuve Congo charrie des mythes, des récits, des légendes et des fables sur ses origines, sur les entités qui le hantent et sur les forces qui l’animent. », renseigne, avec talent, Serge Mboukou, docteur en anthropologie sociale et ethnologie, dans son article paru dans le Portique et intitulé « Et au milieu coule le fleuve. Espace, dynamiques et transversalités ».

De Musofi à Kisangani : 3 chutes et 3 biefs

La source du Lualaba est située dans le territoire de Kambove (province du Haut-Katanga), à 1420 m d’altitude, près du village de Musofi, non loin de la frontière zambienne. Passant entre le massif de Sakabinda et le plateau de la Manika, le Lualaba descend de la chaîne des Mitumba par la gorge de Nzilo et se dirige vers le nord jusqu’à Kisangani.

Son cours supérieur n’est pas un long fleuve tranquille, loin s’en faut. On y dénombre trois chutes célèbres : chute de Nzilo, Portes d’enfer et Chutes Boyoma

Son cours supérieur n’est pas un long fleuve tranquille, loin s’en faut. On y dénombre trois chutes célèbres. Celles de Nzilo, en amont de Kolwezi, tombent de 1198 mètres de hauteur. En aval de Kongolo, le fleuve vint se buter contre un seuil rocheux dans lequel il s’est frayé un passage étroit que l’explorateur anglais Mohun a baptisé Portes d’enfer, en 1894. La troisième zone de chutes est formée, en amont de Kisangani, de sept cataractes dénommées Chutes Boyoma, anciennement connues sous le nom de Stanley Falls ou chutes Ngaliema.

Entre ces chutes, trois biefs permettent la navigation : de Bukama à Kongolo (646 km), de Kasongo à Kibombo rive (110 km) et de Kindu à Ubundu (310 km).  Entre temps, le Lualaba aura traversé en partie le lac Upemba et totalement le lac Kisale où il reçoit son premier affluent important de rive droite, la Lufira, qui prend également sa source près de Musofi.

Si le Lualaba n’est pas navigable partout, ses chutes et celles de ses affluents ont favorisé la construction de centrales hydroélectriques : Nsilo, Nseke et Busanga sur le Lualaba, Koni et Muadingusha sur la rivière Lufira qui s’achemine à travers les territoires de Kambove et de Mitwaba (Haut-Katanga)  jusque dans la dépression de l’Upemba et  la centrale de Mpiana-Mwanga, sur la Luvua, exutoire du lac Moero.

Si le Lualaba n’est pas navigable partout, ses chutes et celles de ses affluents ont favorisé la construction de centrales hydroélectriques

À partir de Nyangwe, petite cité bâtie sur la rive droite du Lualaba, dans la province du Maniema, le fleuve quitte la région des savanes pour entrer dans la forêt équatoriale, qu’il n’abandonnera qu’après Lukoléla. Nyangwe fut une plaque tournante importante pour les Arabes pour le commerce de marchandises comme l’ivoire et d’esclaves de la fin du XIXè siècle. L’explorateur David Livingstone fut le premier européen à la visiter en 1871, suivi, plus tard, par Henry Morton Stanley.

Source : CICOS. Atlas du Bassin du Congo. Édition. 2016

De Kisangani à Kinshasa 

À partir de Kisangani, le Lualaba commence à s’infléchir vers l’ouest pour décrire un immense demi-cercle jusqu’à Mbandaka. En aval de Kisangani, il change d’identité pour devenir le Congo. À Isangi, il reçoit, sur sa rive gauche, un de ses gros affluents : la rivière Lomami. Née à l’ouest de la ville de Kamina, à plus de 1100 m d’altitude, dans la province du Haut-Lomami, le cours de cette rivière est quasiment parallèle à celui du Lualaba.

En aval de Kisangani, il change d’identité pour devenir le Congo.

D’Isangi, le Congo file vers Basoko, puis Bumba et Lisala, villes situées dans la province de la Mongala, avant d’atteindre Makanza et Mbandaka  (province de l’Équateur).

À Mbandaka, où il s’étale en des dizaines de bras, il se dirige vers le sud. Passé le chef-lieu de l’Équateur, il est grossi successivement par des cours d’eau de rive droite : l’Ubangi (Oubangui) et la Sangha, deux affluents de taille, et des rivières plus petites comme le Kouyou, l’Alima et la Léfini.

Prenant le relais de l’Ubangi, le fleuve Congo fait frontière avec le Congo-Brazzaville, jusqu’à Ntombo, localité sise dans le sud du département du Pool (Congo).

À hauteur de Mpouya au Congo-Brazzaville, le fleuve se resserre en un corridor étroit, de moins de deux kilomètres de largeur, profond et puissant, jusqu’à Maluku.

En aval de son confluent avec la rivière Léfini, le Congo reçoit, sur sa rive gauche, le Kwa-Kasaï, son plus gros affluent (10 000 m3/s en moyenne).

Kinshasa n’est plus très loin. Là s’achèvera cette autoroute fluviale, longue de 1743 km, qu’empruntent, à tous moments, barges, pousseurs, baleinières, bateaux rapides, hors-bord, pirogues et petites embarcations de pêche, pour des parcours plus ou moins longs et périlleux. Un parcours largement conté et raconté depuis la nuit des temps.

Kinshasa n’est plus très loin. Là s’achèvera cette autoroute fluviale, longue de 1743 km, qu’empruntent, à tous moments, barges, pousseurs, baleinières, bateaux rapides, hors-bord, pirogues et petites embarcations de pêche, pour des parcours plus ou moins longs et périlleux.

De Kinshasa à Banana

À l’extrémité du long couloir étroit, les rives abruptes du fleuve s’éloignent subitement. À droite, se dressent les Falaises de grès de Manguenguengue, autrefois appelées falaises de Douvres (Dover Cliffs) par les Belges. À gauche, s’étend une plaine herbeuse, jadis hérissée de malebos (palmiers borassus).

Avant d’atteindre les deux capitales les plus rapprochées au monde, Brazzaville, posée sur sa rive droite, et Kinshasa, sur sa rive gauche, le fleuve Congo se transforme en un vaste lac, appelé Pool Malebo (ex-Stanley Pool). Long de 30 kilomètres et large de 25 km, il est occupé par l’île Mbamou, rattachée au Congo-Brazzaville.

Avant d’atteindre les deux capitales les plus rapprochées au monde, le fleuve Congo se transforme en un vaste lac, appelé Pool Malebo (ex-Stanley Pool).

En aval du Pool Malebo, le fleuve se rétrécit à nouveau et forme une suite de cataractes, créées par de profonds canyons, appelées chutes Livingstone. Puis il s’engouffre dans la province du Kongo Central,  où il s’est creusé un lit à travers la chaîne des Monts Cristal.

Lire aussi : RDC : un festival pour célébrer le fleuve Congo. https://www.makanisi.org/rdc-un-festival-pour-celebrer-le-fleuve-congo/

De Kinshasa à Matadi, il n’est pas navigable, pas sur de longues distances en tout cas. Il faudra attendre Matadi pour revoir, enfin, des bateaux emprunter son cours. Plutôt de gros bateaux venant de l’océan ou s’y rendant. Car Matadi, bien que situé à l’intérieur des terres, est un port maritime, le seul pour le moment, avant que ne soit construit le port en eau profonde de Banana.

C’est à une quarantaine de kilomètres en amont du port de Matadi, entre l’île de Sikila et l’embouchure de la rivière Bundi, que se trouve le site hydroélectrique d’Inga, le plus puissant d’Afrique, constitué par une série de rapides sur le fleuve Congo. Ses deux centrales hydroélectriques, Inga I (351 MW), mise en service en 1972, et Inga II (1424 MW), ouverte en 1982, totalisent une puissance installée de 1 775 MW (14 groupes).

C’est à une quarantaine de kilomètres en amont du port de Matadi, entre l’île de Sikila et l’embouchure de la rivière Bundi, que se trouve le site hydroélectrique d’inga, le plus puissant d’Afrique.

De Matadi à Banana, le fleuve, qui sert de frontière avec l’Angola, situé sur sa rive gauche, s’écoule entre deux rives bordées d’arbres majestueux. Boma est le dernier port fluvial avant l’embouchure du fleuve qui se situe entre Banana (RDC) et Soyo (Angola). 

De sa source jusqu’à Banana, le Lualaba-Congo a traversé 11 provinces : le Haut-Katanga, le Lualaba, le Haut-Lomami, le Tanganyika, le Maniema, la Tshopo, la Mongala, l’Équateur, le Maï-Ndombe, la Ville-Province de Kinshasa et le Kongo Central.

Le fleuve Congo, source d’inspiration des écrivains, des cinéastes et des musiciens

Récits, nouvelles, romans, essais (liste non exhaustive)

  • STANLEY (Henry M.). À travers le continent mystérieux. Découverte des sources méridionales du Nil, Circumnavigation du lac Victoria et du lac Tanganyika. Descente du fleuve Livingstone ou Congo jusqu’à l’Atlantique. Tome II. Traduit de l’anglais avec l’autorisation de l’auteur par Mme H. Loreau. Paris, Hachette, 1879
  • CONRAD (Joseph). Heart of darkness (Au cœur des ténèbres). In Blackwwod’s Mahgazine. 1899,  puis publié dans Youth : A Narrative, and Two Other Stories. 1902
  • NAIPAUL (V.S.), À la courbe du fleuve. Traduit de l’anglais par G. Clarence, Paris, Albin Michel, 1982.
  • LOPES (Henri). Ces eaux donnèrent la vie. In Le Courrier de l’Unesco n° 9, septembre 1983, p. 13.
  • SMITH (Stephen). Le fleuve Congo, récit de voyage. Photos de Patrick Robert. Paris, Actes Sud, 2003.
  • NGOÏE-NGALLA (Dominique). La geste de Ngom’-Mbima. Bajag-Meri, 2007.
  • MWANKUMI (Dominique). Les pêcheurs intrépides du Congo. Préface du Cardinal Fridolin Ambongo Besungu. Paris, L’École des Loisirs, 2009
  • DONGALA (Emmanuel). Photo de groupe au bord du fleuve. Actes Sud, 2010
  • NEYT (François). Fleuve Congo. Art d’Afrique centrale. Correspondances et mutations des formes. Paris, Fonds Mercator. 2010 (ouvrage sur l’exposition “Fleuve Congo” au Musée du Quai Branly, à Paris, du 22 juin au 12 septembre 2010).
  • MBOUCKOU (Serge). Et au milieu coule le fleuve. Espace, dynamiques et transversalités : le fleuve Congo comme milieu et comme représentation. In Le Portique [En ligne], 25 | 2010, document 7, mis en ligne le 25 novembre 2012. http://journals.openedition.org/leportique/2484
  • EVANS (Freddi William). Congo Square, racines africaines de la Nouvelle Orléans. Éditions La tour verte, 2012. (Prix Humanities Book of the Year 2012).
  • VUILLARD (Éric), Congo. Arles, Actes Sud,  2012
  • GOSSE (Agate). À la source de mes mots : le fleuve Congo. Paris, L’Harmattan, 2014
  • MARGUERIE (Florence). Kimya et le jeune gorille du fleuve Congo. 2014
  • CICOS. Atlas du Bassin du Congo. Édition 2016. Kinshasa, CICOS, 2016
  • ORBAN (Jean-Pierre). Toutes les îles et l’océan. Édition Mercure de France, 2018 (Remontée du fleuve opérée par la violoniste Adèle)
  • POURTIER (Roland). Congo : Un fleuve à la puissance contrariée. Paris, CNRS Édition. 2021
  • GUIRAUD (Bernard). Les Enfants du fleuve Congo. Les Éditions du Net, 2021
  • BOALE (Stéphanie). Parfum du savoir. Éditions Punubula, 2023
  • LORETTE (Alex). Un fleuve au galop. Genèse Édition. 2023
  • KONGA WANGUWA (Désiré). Transaqua : Le bassin du Congo et le projet de transfert des eaux vers le lac Tchad. Paris, l’Harmattan, 2023
  • EKAMBO (Jean-Chrétien). Le Congo-Zanzibar du journaliste Henry M. Stanley. Paris, l’Harmattan, 2023.

Films

  • BOE (Gérard de).  Pêcheurs Wagenia. 1952
  • COPPOLA (Francis Ford). Apocalypse Now. Adaptation au cinéma du roman de Conrad. 1979
  • MICHEL (Thierry). Congo River. Au-delà des ténèbres. 2005

Comptines

  • Piroguiers du Congo (Fugue et mandarine), Vol. 14 CD J’ai des chansons plein la tête) ; Paroles et musique de Jean-Yves le Duc
  • Sur le grand fleuve Congo, je pagaie, tu pagaies, par Marie Henchoz. Minicroche, Vol. 3: fait le tour du monde. Éditions Loisirs et Pédagogie. 2023
  • Olélé moliba makasi. Comptine

Chansons

  • Wanga Freddy, dit Jaz Royal. Tosengi Balisage ya fleuve Congo. 2020
  • Papa Wemba. Congo moko.
  • Simaro Massiya Lutumba. Ebale Ya Zaire.
  • Franco et le T.P. O.K. Jazz.  République du Zaire.

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