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jeudi 28 mars 2024
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La Région des Grands lacs en bref

Sur le plan géographique, la Région des Grands Lacs (RGL) désigne l’espace qui s’organise autour des lacs Victoria, au nord, et Tanganyika, au sud. Elle comprend des provinces de l’est de la République démocratique du Congo- RDC (Ituri, Nord Kivu, Sud Kivu et Tanganyika), le Burundi, le Rwanda, la pointe ouest du Kenya, le sud de l’Ouganda, le nord-ouest de la Tanzanie et la nord-ouest du Mozambique.

Informations collectées et synthétisées par Muriel DEVEY MALU-MALU*

La branche occidentale du Rift Est Africain

La Région des Grands Lacs (RGL), que Stanley appelait la perle de l’Afrique,  fait partie de la branche occidentale du Grand Rift est-africain qui s’étend de l’Éthiopie au Mozambique sur plus de 4 000 kilomètres. Résultat d’une fracture majeure du continent, de forme quasi méridienne,  le Rift  est divisé, au niveau du lac Victoria, source du Nil, en deux vallées qui encadrent le lac. À l’est, se trouve le rift oriental, à l’activité volcanique intense et,  à l’ouest, le rift occidental.  Longue de 2 100 kilomètres, la branche occidentale s’étend de l’extrémité nord du bassin du lac Albert jusqu’au fossé Sud-Mozambique, au sud du lac Malawi.

Des chapelets de lacs, grands réservoirs naturels  d’eau douce

Carte des Grands lacs d’Afrique @Cicos

Le Rift Est africain s’étend en une succession de dépressions, de hauts plateaux, de lacs et de volcans. L’une de ses caractéristiques est la présence d’innombrables lacs. En effet, l’intense activité volcanique a fait naître de nombreux lacs de cratère, en particulier dans le Rift occidental. Au fond des vallées se sont formés quelques-uns des plus grands lacs d’Afrique,  aux formes étroites mais très allongées, dont la plupart sont très profonds. Seuls grands réservoirs naturels d’eau de surface sur le continent africain, les lacs du Rift figurent parmi les plus grands lacs d’eau douce du monde.

Un espace de refuge et d’échanges

Les vallées  du Rift qui traversent toute la partie orientale du continent africain du nord au sud ont, de tout temps, constitué un formidable couloir d’échanges entre les populations riveraines et de migrations pour les hommes et leurs bêtes entre le nord et le sud du continent. À l’inverse, les montagnes et les hauts plateaux entaillés de vallées profondes ont servi de refuge pour les peuples assiégés.

Une zone très convoitée pour ses ressources et sa biodiversité

La RGL est une zone riche en ressources naturelles (eau, mines, pétrole, poissons, bois et géothermie…). Les ressources minières y sont particulièrement importantes et diversifiées dans l’est de la RDC. Par la diversité de ses reliefs, ses terres volcaniques et ses lacs,  le Rift est également une région agro-pastorale. Les montagnes qui entourent les lacs abritent un ensemble unique de végétations, de flores et de faunes exceptionnelles, parfois endémiques. Dotée de nombreuses ressources naturelles, château d’eau et point de jonction des grandes routes est-ouest et nord-sud, cette région attire, plus qu’aucune autre, les convoitises de toutes parts. D’où les conflits qui la traversent et la présence de groupes armés.

Deux organisations sous-régionales

Les pays de la RGL se répartissent entre deux organisations régionales : la East African Community (EAC) ou Communauté d’Afrique de l’Est, et la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL).

  • Fondée en 1999 sur l’héritage d’une première communauté Est africaine créée en 1967 et dissoute en 1977, la EAC regroupe l’Ouganda, le Rwanda, le Burundi, le Kenya, la Tanzanie et le Soudan du Sud.
  • La CIRGL a été établie conjointement par le Secrétariat des Nations Unies et l’Union Africaine à Nairobi (Kenya) en 2000, suite aux nombreux conflits qui ont marqué la RGL au cours de la décennie 1990. Elle comprend douze États membres : l’Angola, le Burundi, la République Centrafricaine, la République du Congo, la RDC, le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda, la République du Sud Soudan, le Soudan, la Tanzanie et la Zambie.

À la charnière de l’Afrique anglophone et de l’Afrique francophone

La limite entre l’Afrique anglophone et l’Afrique francophone traverse la RGL, avec toutefois une prédominance de l’anglais. Le swahili, langue internationale largement pratiquée dans les zones et pays concernés, y prédomine également. L’anglais est langue officielle en Ouganda. Au Kenya et en Tanzanie, il se partage ce statut avec le swahili. Le Rwanda compte trois langues officielles : l’anglais, le français et le kinyarwanda. Le français est la langue officielle en RDC. Au Burundi, il partage ce statut avec le kirundi. À coté de ces langues officielles, existent des langues nationales et vernaculaires, largement parlées par les populations. En RDC, le swahili, largement parlé dans la partie est du pays, a le statut de langue nationale.  

Les axes de transport

Dans la Région des Grands Lacs, deux axes de transport terrestre (routes et chemins de fer) coexistent.  Une partie des infrastructures se heurte vers l’Ouest à la barrière montagneuse et forestière des provinces de l’Ituri et des deux Kivu.

  • L’axe Est-Ouest, prédominant, relie le littoral de l’océan Indien à des « intérieurs » plus ou moins éloignés et enclavés.  Il comprend deux grands corridors, qui partent principalement des ports de Mombassa (Kenya) et Dar-Es-Salaam (Tanzanie). Le corridor Nord est le plus important. Partant de Mombassa, il se dirige vers Nairobi (Kenya) et Kampala (Ouganda). Puis il se divise en deux branches dont l’une conduit à Kasese (Ouganda) et à l’est de la RDC.  Le deuxième corridor part de Dar-es-Salaam pour se diriger vers Kigoma, sur le lac Tanganyika. À partir de Tabora, un embranchement mène à Mwanza, au nord, sur le lac Victoria. À partir d’Isaka, un second embranchement conduit à Bujumbura (Burundi), Kigali (Rwanda), Bukavu et Goma (RDC).
  • L’axe nord-sud est peu structuré. Il a comme dessertes les lacs Victoria au nord et Tanganyika au sud. Un réseau de ferries assure les échanges entre les villes riveraines de chacun des lacs. Le relais est pris, dans certains cas, par la route et le rail.
  • Des liaisons aériennes renforcent ces échanges. Certains pays, dont le Rwanda, se positionnent comme hubs aériens.

Encadré : les lacs et leurs caractéristiques

Lac Victoria (États riverains : Ouganda, Kenya, Tanzanie)

Le Lac Victoria, ou Nyanza, doit son nom à la reine anglaise Victoria qui régna du 20 juin 1837 jusqu’à sa mort le 22 janvier 1901. Ses États riverains sont le Kenya, l’Ouganda et la Tanzanie. Situé à 1 130 mètres d’altitude, sur le plateau séparant les deux branches du Rift Est africain, peu profond et au contour très découpé, il résulte de l’ennoiement du plateau causé par l’inversion du cours de rivières lors du soulèvement des marges de la branche Ouest du Rift. Le lac Victoria fait partie du bassin du Nil.

  • Superficie : 68 100 km2  (1er lac d’Afrique et 3ème lac au monde après le lac Supérieur – Canada/États-Unis) ;
  • Profondeur maximale : 92 m ; moyenne : 40 mètres ;
  • Longueur : 320 km ; Largeur : 275 km ;
  • Volume : 2 750 km3 ;
  • Principaux ports : Kisumu, Mwanza, Bukoba, Entebbe, Beli et Jinja

Lac Albert (États riverains : RDC et Ouganda)

Juché à 620 mètres d’altitude, très poissonneux, le lac Albert, anciennement appelé M’vouta-N’zighé  et Mobutu Sese Seko, est à cheval sur la RDC (province de l’Ituri) et l’Ouganda. Son existence a été révélée à l’Europe en 1864 par l’explorateur anglais Samuel White Baker. Le lac Albert fait partie du bassin du Nil. Il recueille les eaux du lac Victoria par le Nil Victoria, et celles du lac Édouard, via la rivière Semliki. À l’extrémité nord du lac,  sa sortie est le Nil Blanc ou Albert (appelé Nil des montagnes lorsqu’il pénètre au Soudan).

  • Superficie : 5 270 km2  (7ème lac d’Afrique) ;
  • Profondeur maximale : 58 mètres ;  moyenne : 25 mètres ;
  • Longueur : 160 km ; Largeur : 35 km ;
  • Volume : 133 km3
  • Ports principaux : Kasenyi (rive congolaise) et Butiaba (rive ougandaise), tête de la route qui mène à Kampala, sur le lac Victoria

Lac Édouard ou Edward (États riverains : RDC et Ouganda)

Juché à 912 m au-dessus du niveau de la mer, le lac Edouard, se situe à cheval sur la RDC (province du Nord-Kivu) et l’Ouganda. Le premier Européen à l’avoir découvert en 1889 est l’explorateur anglo-américain Sir Henry Morton Stanley. Le lac Édouard appartient au bassin du Nil. Il est alimenté au nord-est par le lac George (Ouganda) et le Rutshuru qui prend sa source en Ouganda, et par la Rwindi au sud. Il se déverse dans le lac Albert, via la rivière Semliki, barrée de nombreuses chutes et rapides. De hauts escarpements contournent la rive ouest du lac et des montagnes s’élèvent sur la rive nord-ouest.

  • Superficie : 2 150 km2 ;
  • Profondeur maximale : 120 mètres ;
  • Longueur : 77 km ; Largeur : 40 km ;
  • Volume : 77 km3 ;
  • Principaux ports : Ishango (rive congolaise) ; Rukambura (rive ougandaise)

Lac Kivu (États riverains : RDC et Rwanda)

Sis à 1460 mètres d’altitude, ce qui en fait le lac le plus élevé d’Afrique centrale, le lac Kivu se trouve à cheval sur la RDC (provinces du Nord et du Sud-Kivu) et le Rwanda. Le premier  Européen  qui découvrit le lac le 6 juin 1894, fut l’officier allemand, Comte Gustav-Adolf Von Goetzen. Les eaux du lac Kivu se déversent dans le lac Tanganyika via la Ruzizi. Le centre du lac est occupé par l’Ile d’Idjwi qui est en territoire congolais. Les riches sols volcaniques de ses rives sont couverts de forêts d’eucalyptus et de pins et abritent de nombreuses cultures.

  • Superficie : 2 700 km2 ;
  • Profondeur maximale : 485 mètres / moyenne : 220 mètres ;
  • Longueur : 97 km ; Largeur : 48 km ;
  • Volume : 569 km3 ;
  • Ports principaux : Goma et Bukavu (rive congolaise). Gisenyi, Kibuye, Cyangugu  (rive rwandaise)

Lac Tanganyika (États riverains : RDC, Tanzanie, Zambie, Burundi)        

Juché à 775 mètres d’altitude et bordé d’escarpements s’élevant jusqu’à près de 3 000 mètres d’altitude, le lac Tanganyika se trouve à cheval sur la RDC (provinces du Sud-Kivu et du Tanganyika), le Burundi, la Tanzanie et la Zambie. Les premiers Européens à l’avoir découvert sont les explorateurs britanniques John Speke et Sir Richard Burton. Le lac Tanganyika appartient au bassin du Congo. Il reçoit les eaux du lac Kivu via la Ruzizi  et celles de la rivière Malagarazi qui prend sa source au Burundi. Il se déverse dans le Lualaba (fleuve Congo) via la Lukuga, barrée de rapides.

  • Superficie : 32 900 km2  (2ème lac d’Afrique après le lac Victoria) ;
  • Profondeur maximale : 1 471 mètres  (2ème place mondiale après le lac Baïkal en Sibérie)
  • Longueur : 677 km ; Largeur moyenne : 54 km ;
  • Volume : 18 800 km3 ;
  • Ports principaux : Kalemie, Baraka (rive congolaise) ; Kigoma  (rive tanzanienne) ; Bujumbura (rive burundaise) ; Mpulungu (rive zambienne)

Lac Moero ou Mweru (États riverains : RDC et Zambie)

Situé au sud-ouest du lac Tanganyika, le lac Moero a pour États riverains la Zambie et la RDC (province du Haut-Katanga). Il appartient au bassin du Congo. Il est alimenté par la rivière Luapula et se déverse dans le Lualaba (Congo supérieur), via la Luvua.

  • Superficie : 5 120 km2 ; 
  • Profondeur maximale : 27 mètres ;
  • Longueur : 110 km ; Largeur : 50 km ;
  • Ports principaux : Pweto, Kwila (rive congolaise) ; Chiengi (rive zambienne)    

Lac Malawi (États riverains : Malawi, Mozambique, Tanzanie)

Les rives du plus méridional des lacs de la vallée du Rift se partagent entre le Malawi, le Mozambique, la Tanzanie. Le lac Malawi, ou Nyasa, est le seul des grands lacs de fossé à avoir un débouché sur la mer via le fleuve Zambèze.

  • Superficie : 30 044 km2  (3ème rang en Afrique) ;
  • Profondeur maximale : 700 mètres ; moyenne : 264 mètres ;
  • Longueur : 580 km ; Largeur : entre 30 km et 80 km ;
  • Volume : 6140 km3 (5ème place mondiale) ;
  • Ports principaux : Nkhotakota (rive malawite) ; Chuwanga (rive mozambicaine)

*Sources :

  • Le Rift est-africain, une singularité plurielle. Sous la direction de Bertrand Hirsch et de Bernard Roussel. Paris, Éditions IRD, 2009. 424 p.
  • CAZENAVE-PIARROT (Alain). Les recompositions socio-spatiales dans la région des grands lacs. 2008.
  • CAZENAVE-PIARROT (Alain). Région des Grands Lacs africains : collapse nature-société pronostique.  In : Danslamarge, Géographica, 2010.
  • SAINT MOULIN (Léon de), KALOMBO Tshibanda (Jean-Luc). Atlas de l’organisation administrative de la République démocratique du Congo. Cepas, Kinshasa, 2005. 235 p.
  • FRANÇOIS (Alain).  L’Afrique de l’Est aujourd’hui. Un espace en recomposition. In : L’Information géographique, volume 64, n° 1, 2000, pp. 20-36
  • CICOS. Atlas du Bassin du Congo. Édition 2016. 95 p.
  • Encyclopédie Universalis
  • Jeune Afrique. Atlas de l’Afrique
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