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samedi 27 juillet 2024
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Atlas historique de la Terre : l’histoire d’une planète aujourd’hui en péril ?

Alors que les changements climatiques se font de plus en plus sentir et que se multiplient les rendez-vous climat internationaux, aux résultats mitigés, « l’Atlas historique de la Terre et de son usage par les humains » de Christian Gradaloup, vient mettre un coup de projecteur salutaire sur l’histoire de la terre et des rapports des sociétés humaines à la nature au cours des siècles. Des relations restées longtemps équilibrées, jusqu’à ce qu’une approche sous-tendue par une idée de progrès sans fin et reposant sur l’exploitation des ressources naturelles pour satisfaire les besoins industriels et économiques, ne vienne rompre ces équilibres. Initiée par l’Europe dès le XVème siècle, cette logique a été relayée par tous les pays industrialisés au XXème siècle. 

Face aux enjeux socio-économiques et environnementaux que pose la surexploitation des ressources naturelles aujourd’hui, cet Atlas apporte des éclairages précieux. Un ouvrage à avoir dans sa bibliothèque pour le lire et le relire.

« La Terre, planète modeste tournant autour d’une étoile, présente une particularité extraordinaire, unique en l’état de nos connaissances : elle abrite la vie. Parmi le foisonnement du vivant, les humains ont pu dominer les autres espèces et transformer la Terre au point de mettre en péril leur propre avenir ». Tel est le message que nous livre l’ouvrage « Atlas historique de la Terre » de Christian Grataloup, dans sa quatrième de couverture.

Parmi le foisonnement du vivant, les humains ont pu dominer les autres espèces et transformer la Terre au point de mettre en péril leur propre avenir 

En nous racontant, faits et chiffres à l’appui, l’histoire mouvementée de la planète terre et l’usage qu’en a fait l’homme depuis des milliards d’années, l’Atlas historique de la terre semble faire écho aux propos du pape François. Ce dernier écrivait en effet, en 2015, dans sa lettre encyclique « Laudato si’ » : « Loué sois-tu, mon Seigneur », chantait saint François d’Assise. Dans ce beau cantique, il nous rappelait que notre maison commune est aussi comme une soeur, avec laquelle nous partageons l’existence, et comme une mère, belle, qui nous accueille à bras ouverts. […] Cette soeur crie en raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. Nous avons grandi en pensant que nous étions ses propriétaires et ses dominateurs, autorisés à l’exploiter ».

À (re)lire – Gabon : les peuples autochtones au cœur des enjeux climatiques. https://www.makanisi.org/gabon-les-peuples-autochtones-au-coeur-des-enjeux-climatiques/

Christian Grataloup, spécialiste de géohistoire, surnommé « le plus historien des géographes »

Une trentaine de scientifiques

C’est avec le concours des rédactions des revues L’Histoire et Sciences et Avenir / La Recherche, que Christian Grataloup, spécialiste de géohistoire, surnommé « le plus historien des géographes », a pu réunir plus de trente scientifiques pour réaliser le premier atlas racontant à la fois l’histoire de notre planète Terre et celle de l’aventure humaine. 

Parmi ces scientifiques figurent des archéologues, des astrophysiciens, des biologistes, des climatologues, des historiens, des planétologues, des géographes… Citons quelques noms : Charlotte Becquart-Rousset, agrégée de géographie, les journalistes scientifiques Léna Hespel et Philippe Pajot, Héloise Kolebka, rédactrice en chef de la revue l’Histoire, ainsi que l’équipe de l’agence Légendes cartographie.

9 chapitres et 300 cartes

Les contributions de ces scientifiques, journalistes et cartographes ont produit un ouvrage passionnant. C’est au travers de 9 chapitres, certes chronologiques mais qui font aussi ressortir les enchevêtrements entre les 9 périodes choisies pour structurer l’atlas, qu’est retracée l’histoire de Planète Terre : Du big bang à la planète Terre ; Du noyau à la stratosphère ; Une planète de la vie ; L’animal humain : Les domestications ; La grande période agricole ; La mondialisation des ressources ; L’ère du carbone fossile ; La planète saturée.

Cet  atlas, qui se présente comme un ouvrage de géohistoire, comprend 300 cartes et graphiques ainsi que des photos « pour dire » et des centaines de textes et encadrés « pour analyser et expliquer ». Cette mise en page, illustrée et agrémentée de textes, a pour but de visualiser hier et aujourd’hui, pour lutter contre l’amnésie, et de comprendre les dynamiques, physiques et humaines, qui ont évolué au cours des siècles.

Tout type de public, quelles que soient sa formation, ses activités et ses marottes, peut consulter et lire cet Atlas.

À (re)lire – Forêts du Bassin du Congo, des identités culturelles à préserver. https://www.makanisi.org/forets-du-bassin-du-congo-preserver-les-identites-culturelles/

Une géohistoire

Tout type de public, quelles que soient sa formation, ses activités et ses marottes, peut consulter et lire cet Atlas, en continu comme un livre ou en le feuilletant en fonction de ses centres d’intérêt. Celui qui se passionne pour la géographie physique, l’astronomie, le climat ou la géologie trouvera dans les premiers chapitres tout ce qu’il cherche à savoir sur l’apparition et le développement de la terre non encore inhabitée par les êtres humains. Il découvrira une histoire scandée par la géologie, la tectonique des plaques, le climat, la géographie, les événements violents, terrestres ou cosmiques.

L’historien ou tout simplement le passionné d’histoire, qui veut en savoir un peu plus sur l’apparition de la vie et des sociétés humaines sur terre, consultera plus volontiers les autres chapitres.

Pour notre part, nous avons été particulièrement intéressés par l’humanisation de la planète Terre : les débuts et l’expansion de l’agriculture, de la pêche, de la domestication des animaux et des végétaux… Mais également par le chapitre « la mondialisation au XVème siècle », une période au cours de laquelle se retissent les liens entre l’Eurasie et l’Afrique et se développent les échanges entre l’Europe et l’Asie, dont l’Océan indien devient alors le trait d’union.

Les « Maitres et possesseurs de la nature » entendent dominer la nature pour la mettre au service de l’homme.

La mondialisation des ressources

Le chapitre 7 sur « La mondialisation des ressources depuis le XVème siècle » devrait captiver ceux qui interrogent le passé pour comprendre le monde d’aujourd’hui et ses tourments. Et les écologistes bien évidemment. Explorations, travail forcé, traite négrière, exploitation des ressources naturelles, premières déforestations et pandémies… L’Europe part à la conquête du monde. L’aventure durera jusqu’au XXème siècle. Le début du XIXème siècle marque un tournant, en accentuant les déséquilibres de tous ordres engendrés au cours des siècles passés. Habitée par le rêve prométhéen, obsédée par la notion de modernité et la croyance au progrès, et également mue par des intentions moins « pures », l’Europe colonise tandis que les « Maitres et possesseurs de la nature » entendent dominer la nature pour la mettre au service de l’homme. La dualité nature/culture, véhiculée par des courants importants de la pensée occidentale, s’impose. Avec la colonisation, les échanges et l’exploitation des ressources naturelles s’intensifient. Dans le commerce mondial, les matières premières minérales autres que l’or et l’argent, échangés depuis longtemps, viennent s’ajouter aux ressources végétales.

On puise de nouvelles sources d’énergie dans les réserves fossiles enfouies dans le sous-sol de la terre

L’ère du carbone fossile

L’exploitation des ressources naturelles initiée par la révolution industrielle prendra de l’ampleur avec le développement de l’industrie, de l’urbanisation et des transports. Apparaissent alors de nouveaux besoins en énergie. Pétrole, gaz, charbon… On puise de nouvelles sources d’énergie dans les réserves fossiles enfouies dans le sous-sol de la terre. La combustion de ces ressources bouleverse le cycle du carbone… Et voilà venue l’ère de la pollution atmosphérique et des changements climatiques. Du nord au sud, de l’est à l’ouest, tous les pays, peu ou très industrialisés, sont concernés par ces phénomènes.

À (re)lire – Gabon. La Semaine africaine du climat s’achève sur une note d’optimisme. https://www.makanisi.org/gabon-la-semaine-africaine-du-climat-sacheve-sur-une-note-doptimisme/

La planète saturée : le début de la prise de conscience ?

Le dernier chapitre aborde la question de l’augmentation de la pression sur les ressources en lien avec l’accélération des mutations économiques, démographiques et sociales commencées aux siècles précédents. Au-delà de la crainte d’un épuisement des réserves, ce sont les effets de leur exploitation sur la santé, les écosystèmes et le climat qui mobilisent de plus en plus les populations, les militants écologistes et des responsables politiques. Sans exclure les entreprises, dont certaines s’emploient à limiter les émissions de gaz à effet de serre en recourant à des technologies peu ou non polluantes et à des sources d’énergie propres et renouvelables. Ainsi la prise de conscience de la vulnérabilité de la Terre face aux actions humaines s’amplifie.

Ainsi la prise de conscience de la vulnérabilité de la Terre face aux actions humaines s’amplifie.

Toutefois « les mesures prises par les États peinent à soulager une planète au bord de la saturation », signale l’ouvrage. Pour autant, il n’y a pas de quoi verser dans le pessimisme. Dans l’introduction en effet Christian Grataloup déclare : « Pas d’évocation d’une humanité mue par un progrès continu, ni un monde aveugle courant à sa perte, mais des dossiers pour comprendre les dynamiques retracées dans leur longue temporalité ».

Un outil pour la promotion de la culture du développement durable

Si le pessimisme n’a pas sa place, il y a néanmoins urgence à repenser le développement socio-économique et la relation des sociétés humaines avec la nature. Cet atlas nous y convie. Il est d’ailleurs un outil pédagogique précieux pour tous ceux qui appellent à la promotion et à l’enseignement de la culture du développement durable. Outre des scientifiques, ce courant compte dans ses rangs de plus en plus de mouvements citoyens, y compris des religieux, comme l’abbé Dieudonné Mushipu Mbombo, originaire de la RDC, auteur de « La Théologie africaine face à l’urgence écologique » (Karthala).

Jusqu’où peut-on exploiter, sans mesure et sans respect de la nature, les ressources de la planète sans risque pour la survie de l’humanité ?   

Très documenté, sans parti pris, bien illustré, l’atlas aborde avec sérieux, dans un aller-retour permanent entre le passé et le présent, entre l’histoire et la géographie, des questions devenues de plus en plus existentielles et essentielles : jusqu’où peut-on exploiter, sans mesure et sans respect de la nature, les ressources de la planète sans risque pour la survie de l’humanité ?   

Christian Grataloup

Ancien élève de l’ENSET Cachan, agrégé et docteur en géographie, professeur émérite à l’université Paris VII-Denis Diderot, Christian Grataloup fut aussi professeur à Sciences Po Paris et président du conseil scientifique de l’Unité de formation et de recherche (UFR) Géographie, Histoire, Sciences de la Société (GHSS). Il est spécialiste de géohistoire (de la mondialisation), de didactique et de modélisation graphique.

Il a publié de nombreux ouvrages dont : Faut-il penser autrement l’histoire du monde ? (2011), Géohistoire de la mondialisation. Le temps long du monde (2015), Le Monde dans nos tasses. Trois siècles de petit déjeuner (2017), Cabinet de curiosités de l’histoire du monde (2020) ou L’Invention des continents et des océans (2020). En 2019 et 2020, il publie aux Arènes l’Atlas historique mondial et l’Atlas historique de France.

Atlas historique de la Terre et de son usage par les humains
  • Auteur : Christian Grataloup
  • Édition : Les Arènes – L’Histoire
  • Date de publication : 06 octobre 2022
  • Pages : 340 pages
  • ISBN : 978-2-14-028800-5
  • Prix : 29,90 euros
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